Antoine BARNAVE (1761-1793)

Publié le par DAN

Né en octobre 1761, fils d'avocat, et lui-même avocat à 21 ans au Parlement de Grenoble, Antoine Barnave prononce en 1783 un discours sur la nécessité de la division des pouvoirs. Il s'engage dès 1787 dans le mouvement d'opposition à la réforme des assemblées provinciales. Lors de la Journée des Tuiles il condamne le despotisme et les édits de mai. Il participe aux Etats du Dauphiné réunis à Vizille en juillet 1788. En 1789, à vingt-huit ans, il est élu député du tiers état de Grenoble aux Etats généraux et y défend la réunion des ordres et le vote par tête conformément au mandat impératif que les députés du Dauphiné ont reçu des états de Romans. Brillant orateur, épris de liberté, il est proche de Lameth et de Duport avec lesquels il forme le « triumvirat » et s'oppose à La Fayette et Mirabeau. 

Le 1er août 1790 il est élu maire de Grenoble. Il siège au comité colonial dès sa création en mars 1790. En octobre 1790, au sommet de sa popularité, il est élu Président de l'Assemblée nationale constituante. En janvier 1791 il défend le club jacobin contre le club monarchique qu'il considère comme « un ramas de factieux ». Mais après avoir tenté d'accélérer la révolution et avoir défendu la liberté comme membre du comité des colonies, il refuse la reconnaissance de la citoyenneté aux gens de couleur des colonies. Le 22 juin 1791, avec Pétion et Latour-Maubourg, il est envoyé comme commissaire par l'Assemblée à la rencontre du roi arrêté à Varennes afin d'escorter le retour de celui-ci à Paris. Il est alors touché par les malheurs de la famille royale et discute longuement avec la reine Marie-Antoinette. Une fiction est propagée visant à faire croire à l'enlèvement du roi par les aristocrates afin que celui-ci pût être arrêté et ramené à Paris en dépit de son inviolabilité. Le 25 juin l'Assemblée décrète que le roi sera suspendu de ses fonctions jusqu'à nouvel ordre.

 

A l'Assemblée les débats du 13 au 16 juillet portent sur l'inviolabilité du roi et les pouvoirs qui lui seront reconnus par la Constitution. Les républicains réclament la déchéance du roi. Le 14 juillet 1791 Robespierre demande que la question de l'inviolabilité royale soit posée à la Nation. « Si un roi appelait sur sa patrie toutes les horreurs de la guerre civile et étrangère ; si, à la tête d'une armée de rebelles et d'étrangers, il venait ravager son propre pays et ensevelir sous ses ruines la liberté et le bonheur du monde entier, serait-il inviolable ? [...] Le roi est inviolable ! Mais les peuples ne le sont-ils pas aussi ? Le roi est inviolable par une fiction ; les peuples le sont par le droit sacré de la nature ; et que faites-vous en couvrant le roi de l'égide de l'inviolabilité, si vous n'immolez l'inviolabilité des peuples à celle des rois ? » L’abbé Grégoire, Pétion, Buzot, Vadier demandent que Louis XVI soit jugé par une Convention nationale.

 

Le 15 juillet, à la tête des constitutionnels, Barnave prononce un discours décisif : « Je place ici la véritable question. Allons-nous terminer la Révolution, allons-nous la recommencer ?... Un pas de plus serait un acte funeste et coupable ; un pas de plus dans la ligne de la liberté serait la destruction de la royauté ; un pas de plus dans la ligne de l'égalité, la destruction de la propriété. »  Il souhaite la consolidation de la monarchie constitutionnelle et défend ardemment l’inviolabilité du roi « principe conservateur de toute monarchie constitutionnelle » qu'il parvient à faire proclamer. Mais l'Assemblée ne se prononce pas sur la fin de la suspension des pouvoirs du roi. Le club des Cordeliers mené par Danton fait circuler une pétition réclamant la République et demandant que la Nation juge le roi : elle recueille 6 000 signatures. Le  club des Jacobins se divise et, le 16 juin, Barnave avec Duport et les Lameth, arguant de leur qualité de fondateurs du club, entraînent ceux de ses membres partisans du maintien de la monarchie, notamment les députés, au couvent des Feuillants. Le 17 juin les Cordeliers appellent les Parisiens à venir au Champ-de-mars signer la pétition déposée sur l'autel de la patrie élevé pour le 14 juillet et réclamant que l'Assemblée revienne sur sa décision. L'Assemblée apprend que deux hommes découverts sous l'autel et pris pour des traîtres ont été décapités par des pétitionnaires. Elle déclare les pétitionnaires réclamant la République criminels de lèse nation et, par crainte d'une émeute, envoie La Fayette protéger l'ordre public. La Fayette, malgré un coup de feu tiré en sa direction, n'estime pas nécessaire de disperser les manifestants venus réclamer la déchéance du roi. La loi martiale est pourtant décrétée. Le soir, Bailly fait boucler les issues de l'esplanade ; la garde envoyée sur place, entendant un coup de feu, tire en l'air  puis, sans sommation, dans la foule. Le « massacre du Champ-de-mars » qui s'ensuivit créera un fossé déterminant entre constitutionnels et républicains, entre modérés et révolutionnaires.

 

Après la séparation de l'Assemblée constituante, Barnave, critiqué pour ses prises de position et surnommé Monsieur Double-Visage, se retirera à Grenoble. Mais il sera arrêté après la découverte, à la suite de la journée du 10 août 1792, d'un document compromettant intitulé Projet du comité des ministres, concerté avec MM. Alexandre de Lameth et Barnave. Incarcéré pendant 15 mois à Grenoble, puis à Fort-Barraux et Saint-Marcellin, il est transféré à Paris et sera condamné par le Tribunal révolutionnaire qui l'enverra à l'échafaud en novembre 1793, à l'âge de trente deux ans.

(source : Assemblée Nationale)

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