Georges Sorel, utopies, réformes et révolutions - études sur le marxisme.

Publié le par DAN

Etudes sur le marxisme.

 Marx Engels - Shangai Chine 2

A l'origine des textes de Georges Sorel reproduit ici, la prétention d'alimenter une réflexion qui favorise l'action sociale, et non pas le soucis de diffuser la doctrine marxiste, ou plus surement sa critique.

A y regarder de près tous les thèmes abordés en ce début de XX° siècle par Georges Sorel sont encore d'actualité, le trade-unionisme aussi bien que la critique des partis politiques. Ce que Sorel analyse ici c'est la constitution de notre moderne oligarchie.

Sans doute les Bourses du Travail qui dans leur projet d'origine ne survivront pas au premier conflit mondial n'ont elles pas réalisées les attentes de leurs concepteurs, Pelloutier, .. mais à travers la Charte d'Amiens une culture de l'indépendance et de l'émancipation ouvrière s'est imposée au mouvement syndical. 

Ce projet etait il très différent, sans influence du courant de liberté des communes qui sous l'Ancien régime permit la constitution de la classe bourgeoise ? Sorel ne s'interroge pas sur cette analogie qui peut être recèle une autre raison, moins conjoncturelle, de l'échec des Bourses du Travail, la dépendance socio-économique des travailleurs.

A l'heure où à Lyon ce ne sont pas moins de trois débats qui vont se succéder sur l'autogestion, ces questions méritent notre réflexion.   

    A. La Décomposition du marxisme [extraits]

 

I . L'enquête - renaissance de la méthode. 

 

Marx avait écrit Le Capital au moyen d'observations faites sur l'Angle­terre ; mais durant les trente années qui avaient suivi cette publication, bien de grands changements s'étaient produits dans l'industrie, dans la politique et dans la vie anglaises ; le meilleur moyen à employer pour rajeunir le marxis­me semblait être de reprendre les enquêtes au point où le maître les avait laissées, et de compléter Le Capital en raison du développement des classes ouvrières d'Angleterre. Dans la préface de son livre, Marx avait dit aux Allemands qu'ils devaient aller chercher dans la patrie du capitalisme les tendances fondamentales qui caractérisent le régime moderne ; il avait même écrit cette phrase que l'on a si souvent reproduite, comme une loi historique incontestable : « Le pays le plus développé industriellement montre à ceux qui le suivent sur l'échelle industrielle, l'image de leur propre avenir. »

 

Le phénomène qui frappe le plus l'observateur de l'Angleterre contempo­raine est évidemment le trade-unionisme. Bernstein, en regardant cette forme d'organisation syndicale comme étant appelée à s'imposer à tous les pays qui marchent sur la voie du capitalisme, Bernstein croyait être fidèle à la méthode de Marx ; mais les représentants officiels de l'école n'admettaient pas qu'on pût être assez hardi pour reconnaître, grâce à cette méthode, des faits con­traires à la thèse de la lutte de classe. Le trade-unionisme a pour objet de régler à l'amiable les conflits qui se produisent entre patrons et travailleurs ; s'il doit se généraliser, il devient impossible de dire que le mécanisme de la production capitaliste aggrave les conflits industriels au point de les trans­former en lutte de classe. Les anciens amis de Bernstein, ne pouvant s'expli­quer comment celui-ci avait pu se mettre à observer pour compléter l'œuvre de son maître, au lieu de faire comme eux des résumés de résumés, pensèrent qu'un tel scandale devait tenir à des causes très impures ; ils accusèrent Bernstein d'avoir été acheté par les capitalistes. Je ne veux pas insister sur ce vilain chapitre de l'histoire de la social-démocratie.

 

Bernstein, persuadé qu'il était demeuré fidèle à l'esprit de Marx, chercha à expliquer comment le développement de la doctrine du maître avait pu le conduire à des résultats si contraires aux thèses enseignées dans l'école ; il fut ainsi amené à se demander si le marxisme ne renfermerait pas des principes contradictoires, parmi lesquels il s'en trouverait qui correspondraient à ses nouvelles doctrines. Il proposa en 1899 une théorie sur laquelle l'attention ne me semble pas avoir été assez portée.

 Il y aurait eu, suivant lui, dans le socialisme moderne, deux courants principaux : « L'un constructif, continue les idées de réforme exposées par des penseurs socialistes ; l'autre emprunte ses inspirations aux mouvements popu­laires révolutionnaires et ne vise, de fait, qu'à détruire. Suivant les possibilités du moment, l'un apparaît comme utopique, sectaire, pacifiquement évolution­niste, l'autre comme conspirateur, démagogique, terroriste. Plus nous approchons des temps présents, plus catégorique est le mot d'ordre : ici, éman­cipation par l'organisation économique et là émancipation par l'expropriation politique... La théorie marxiste chercha à combiner le fonds essentiel des deux courants... Mais cette combinaison ne signifiait par la suppression de l'antagonisme ; elle était plutôt un compromis tel qu'Engels le proposait aux socialistes anglais dans son écrit, La situation des classes ouvrières : subor­dination de l'élément spécifiquement socialiste à l'élément politico-radical et socialo-révolutionnaire. Et qu'elle qu'ait été l'évolution effectuée au cours des années par la théorie marxiste, elle n'a jamais su se défaire de ce compromis, ni de son dualisme ». [...]

 

Les idées de Bernstein furent accueillies avec beaucoup de faveur par les gens qui désiraient voir le marxisme échapper à cet immobilisme dans lequel Kautsky prétendait le retenir ; en signalant l'incohérence des systèmes, Bernstein montrait la nécessité de chercher de nouveaux équilibres, toujours instables et provisoires, entre les tendances fondamentales du socialisme moderne ; ainsi la vie était introduite dans une doctrine jusqu'alors condamnée à la stérilité.

 

En France, l'étude des organisations syndicales a conduit à se demander s'il n'y aurait pas lieu de considérer une décomposition du marxisme autre que celle que Bernstein a examinée. Ce que le marxisme a emprunté aux ancien­nes tendances socialistes constitue ce qui frappe le plus ; mais il se pourrait que Marx eût ajouté quelque chose, qui constituerait ce que j'appellerai le marxisme de Marx ; cette partie est demeurée cachée longtemps parce qu'il n'y avait pas encore d'organisations ouvrières importantes qui lui correspon­dissent, et Bernstein ne l'a pas reconnue parce qu'il ne connaît bien que l'Angleterre et l'Allemagne. Je me propose de montrer ici comment je conçois cette nouvelle manière de comprendre la décomposition du marxisme.

II . Utopies ou réformes - le trade-unionisme. 

 

[...] Les raisonnements des réformateurs sociaux paraissent d'autant plus sérieux qu'ils portent davantage sur des détails, parce qu'ils perdent ainsi le caractère paradoxal des utopies ; les analogies au moyen desquelles ils imaginent le tableau du monde sont d'autant plus faciles à admettre que ce tableau diffère moins de celui que l'on voit sous ses yeux ; les projets semblent d'autant plus pratiques qu'ils sont donnés comme étant favorables au plus grand nombre d'intérêts existants. Il doit donc arriver un jour où les écoles sociales, poussées par le désir d'obtenir toujours un plus grand succès, limitent leurs ambitions à propager l'idée des réformes ; c'est alors qu'elles parviennent à saisir le plus fortement l'opinion publique. 

 

Les grands utopistes du XXe siècle eurent tous pour successeurs des hommes qui abandonnèrent les ambitions primitives des fondateurs pour des réformes, c'est-à-dire pour adopter une attitude conservatrice. Je signale à ce sujet une page curieuse de cette lettre de Proudhon à Considérant que l'on appelle Avertissement aux propriétaires ; cette lettre est du 1er janvier 1842 ; à ce moment le fouriérisme avait fait son évolution, comme l'expose fort bien Proudhon : « Fourier déclare qu'il est nécessaire, au début des études et des expériences sociétaires, de se placer tout à fait en dehors des idées civilisées et de rompre brusquement avec toutes les notions anté-harmoniennes ; c'est ce qu'il appelle procéder par grand écart, d'un terme emprunté aux voltigeurs de corde... Quoi ! cet immense travail de l'humanité serait non avenu, l'histoire n'aurait aucun sens et tout ce mouvement n'aurait été qu'une longue décep­tion ! Vous-même ne le pensez pas, monsieur le rédacteur ; sinon je vous demanderai ce que signifie cet écrit sur la politique générale, qui a produit une si vive impression, et dans lequel vous vous montrez profond socialiste, parce que vous restez dans les données de la société actuelle ».

 

[...] Plus tard on espéra que les associations ouvrières (que l'on nomme aujourd'hui coopératives de production) donneraient la solution pratique du problème économique. Pen­dant longtemps, on a vanté la participation aux bénéfices comme un moyen de créer une économie d'ordre supérieur, qui assurerait à la grande industrie les avantages que la petite avait retirés de l'intérêt pris par d'anciens ouvriers devenus patrons à la réussite de leurs affaires ; il semblait à beaucoup de per­sonnes que la participation aux bénéfices réussirait là où l'association ouvrière semblait incapable de prospérer.

 

 

Aujourd'hui les fabricants de réformes sociales seraient assez disposés à admettre que le contrat collectif renferme une vertu mystérieuse analogue à celle que L. Blanc attribuait à l'association et dont Proudhon se moquait tant. Les ouvriers, par le seul fait qu'ils traiteraient en se servant de l'intermédiaire d'un syndicat, acquerraient une plus haute place dans le monde économique, deviendraient plus capables et auraient droit à une meilleure rémunération. On a parfois comparé le syndicat à un banquier, qui élève d'autant plus ses prétentions que l'industrie est armée d'un outillage plus puissant et qu'elle peut ainsi obtenir des extra-profits plus gros : le contrat collectif serait donc une sorte de commandite portant sur la main-d'œuvre, tandis que la commandite du Code de commerce porte sur de l'argent.

 

Si vraiment le trade-unionisme produisait les résultats que lui attribuent ses défenseurs, il aurait la double conséquence de développer le sentiment de responsabilité chez l'ouvrier et aussi de donner à celui-ci une place juridique plus voisine de celle qui appartient au propriétaire dans la tradition. Ainsi il y aurait progrès économique et progrès juridique : il ne serait donc plus exact de dire, comme le faisaient Marx et Engels dans le Manifeste du parti commu­niste : « Le serf, malgré son servage, s'était élevé au rang de membre de la commune ; le petit bourgeois était devenu bourgeois malgré le joug de l'absolutisme féodal. L'ouvrier moderne, au contraire, au lieu de s'élever par le progrès de l'industrie, descend de plus en plus au-dessous de la condition de sa propre classe ».

  

III . Révolutions - les partis politiques, l'Etat populaire.   

 

Les hommes qui se sont donnés au cours du XIXe siècle comme étant les adeptes les plus authentiques de la tradition révolutionnaire, les véritables représentants des pauvres et les partisans les plus décidés du combat dans les rues, ceux que Bernstein désigne sous le nom de blanquistes, n'étaient pas moins résolus que Considérant à empêcher tout retour vers la barbarie, et un mouvement de jacques n'était pas du tout leur idéal. Bernstein a très bien vu que l'on s'est trop souvent arrêté, dans les jugements portés sur eux, à quelques aspects très secondaires de leur tactique, On ne saurait définir les blanquistes comme étant essentiellement des hommes de complot ; la manière d'arriver au pouvoir leur était indifférente ; posséder le pouvoir était à leurs yeux résoudre toutes les difficultés - on ne met jamais en doute la force créatrice que possède un parti politique révolutionnaire qui a acquis le pouvoir ; un tel parti, une fois arrivé au gouvernement, est beaucoup plus fort que ne le serait un parti conservateur, parce qu'il n'a rien à ménager ; - les conditions économiques étaient regardées comme étant des phénomènes subordonnés.

 

Grâce à l'intervention d'un parti prenant la tête de la révolution, le mouve­ment historique acquiert une allure toute nouvelle et fort imprévue ; nous n'avons plus à faire à une classe de pauvres agissant sous l'influence d'ins­tincts, mais à des hommes instruits qui raisonnent sur les intérêts d'un parti, comme le font les chefs d'industrie sur la prospérité de leurs affaires.

 

Les partis politiques sont des coalitions formées pour conquérir les avantages que peut donner la possession de l'État, soit que leurs promoteurs soient poussés par des haines, soit qu'ils recherchent des profits matériels, soit qu'ils aient surtout l'ambition d'imposer leur volonté. Si habiles que puissent être les organisateurs d'un parti, ils ne sauraient jamais grouper qu'un très faible état-major, qui est chargé d'agir sur des masses mécontentes, pleines d'espoirs lointains et disposées à faire des sacrifices immédiats ; le parti leur fera de larges concessions en cas de succès ; il paiera les services rendus en transformations économiques, juridiques, religieuses, dont la répercussion pourra dépasser infiniment les prévisions. Très souvent, les chefs des partis qui troublent les plus profondément la société appartiennent à l'aristocratie que la révolution va atteindre d'une manière très directe ; c'est que ces hom­mes, n'ayant pas trouvé dans leur classe les moyens de s'emparer du pouvoir, ont dû recruter une armée fidèle dans des classes dont les intérêts sont en opposition avec ceux de leur famille. L'histoire montre qu'on se ferait une idée très fausse des révolutions si on les supposait faites pour les motifs que le philosophe est si souvent porté à attribuer à leurs promoteurs.

 

Lorsque les événements sont passés depuis longtemps, les passions qui avaient conduit les premiers sujets du drame, semblent négligeables en comparaison des grands changements qui sont survenus dans la société et que l'on cherche à mettre en rapport avec les tendances obscures des masses ; généralement, les contemporains avaient vu les choses dans un ordre opposé et s'étaient plutôt intéressés aux compétitions qui avaient existé entre les états-majors des partis. Il faut toutefois observer que, de nos jours, une si grande portée ayant été accordée aux idéologies, tout parti est obligé de faire parade de doctrines ; les politiciens les plus audacieux ne sauraient conserver leur prestige s'ils ne s'arrangeaient pour établir une certaine harmonie entre leurs actes et des principes qu'ils sont censés représenter.

 

L'introduction de partis politiques dans un mouvement révolutionnaire nous éloigne beaucoup de la simplicité primitive. Les révoltés avaient été, tout d'abord, enivrés par l'idée que leur volonté ne devrait rencontrer aucun obstacle, puisqu'ils étaient le nombre ; il leur semblait évident qu'ils n'auraient qu'à désigner des délégués pour formuler une nouvelle légalité conforme à leurs besoins ; mais voilà qu'ils acceptent la direction d'hommes qui ont d'autres intérêts que les leurs ; ces hommes veulent bien leur rendre service, mais à la condition que les masses leur livreront l'État, objet de leur convoi­tise. Ainsi l'instinct de révolte des pauvres peut servir de base à la formation d'un État populaire, formé de bourgeois qui désirent continuer la vie bourgeoise, qui maintiennent les idéologies bourgeoises, mais qui se donnent comme les mandataires du prolétariat.

 

L'État populaire est amené à étendre de plus en plus ses tentacules, parce que les masses deviennent de plus en plus difficiles à duper, quand le premier instant de la lutte est passé et qu'il faut cependant soutenir un instinct de révol­te dans un temps calme ; cela exige des machines électorales compliquées et, par suite, un très grand nombre de faveurs à accorder. En accroissant constam­ment le nombre de ses employés, il travaille à constituer un groupe d'intellec­tuels ayant des intérêts séparés de ceux du prolétariat des producteurs ; il renforce ainsi la défense de la forme bourgeoise contre la révolution prolé­tarienne. L'expérience montre que cette bourgeoisie de commis a beau avoir une faible culture, elle n'en est pas moins très attachée aux idées bourgeoises ; nous voyons même, par beaucoup d'exemples, que si quelque propagandiste de la révolution pénètre dans le monde gouvernemental, il devient un excellent bourgeois avec la plus grande facilité.

 

On pourrait donc dire que, par une sorte de paradoxe, les hommes politi­ques, qui se regardent comme les vrais détenteurs de l'idée révolutionnaire, sont des conservateurs.

 

 Les souvenirs de la Révolution dominèrent pendant fort longtemps la propagande des socialistes. On prétendait identifier, par exemple, les profits capitalistes aux droits seigneuriaux et aux dîmes, que la bourgeoisie supprima autrefois sans indemnité ; on ne manquait pas de faire ressortir que beaucoup de fortunes bourgeoises provenaient de la vente de biens nationaux, qui avait été effectuée dans des conditions singulièrement favorables aux acheteurs. On cherchait à faire entendre que l'État populaire pourrait s'inspirer de ces exemples mémorables pour liquider le capitalisme à peu de frais.

 

Les politiciens révolutionnaires ne se plaçaient point au même point de vue que les utopistes, quand ils résonnaient sur la propriété. Ceux-ci étaient surtout préoccupés de l'organisation du travail, tandis que les politiciens ne voyaient que des revenus à partager ; leur conception était celle des intellec­tuels, qui ont tant de peine à considérer la propriété comme un moyen de production et qui la regardent plutôt comme un titre de possession. La loi devrait (comme elle le faisait si souvent dans les cités antiques) rationner les riches en leur imposant des charges énormes, de manière à rendre plus agréable la vie des pauvres. Les problèmes économiques se trouvent ainsi mis à l'arrière-plan, tandis que les ordres donnés par les maîtres de l'État passent au premier.

 

Qu'avaient voulu les législateurs antiques ? Maintenir dans la cité un nombre suffisant de citoyens aptes à porter les armes et à défendre les tradi­tions nationales ; nous dirions aujourd'hui que leur idéal était bourgeois. Et les hommes de la Révolution française, qu'avaient-ils voulu ? Accroître dans une très grande proportion le nombre des propriétaires aisés ; ils avaient créé une bourgeoisie dont la puissance n'est pas encore épuisée. L'État populaire, en s'inspirant davantage des nécessités économiques contemporaines, pourrait aboutir à des conséquences tout à fait analogues. La translation des revenus peut se faire, en effet, d'une manière indirecte, mais sûre, au moyen d'une législation sociale qui tienne compte des conditions de la grande industrie : créer des moyens d'arbitrage permettant au trade-unionisme d'exercer une action constante sur les salaires ; remplacer le petit commerce des denrées par des services publics d'alimentation, l'exploitation des logements ouvriers par des locations municipales et l'usure des petits prêteurs par des institutions de prévoyance ; trouver des ressources fiscales dans de gros impôts perçus sur les classes riches, de manière à ce que les bonnes aubaines qui se produisent dans les industries reviennent aux œuvres démocratiques. Grâce à ces procédés, l'ouvrier peut devenir un petit bourgeois, et nous arrivons ainsi à retrouver les mêmes conclusions que précédemment : agrégation du prolétariat à la bourgeoisie.

 à suivre

Georges Sorel, publications  

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